Le bal des faux-culs
Alors qu’ils n’ont cessé de critiquer à mi-mots ou d’attaquer frontalement l’action de Jacques Chirac au cours des derniers mois, les lieutenants de Nicolas Sarkozy deviennent tout à coup plus respectueux à l’égard du Président de la République (voire même élogieux) à l’approche du premier tour de l’élection présidentielle. Pourquoi ce retournement de tendance ? Tout simplement parce que les porte-flingues du candidat de l’UMP ont anticipé la décision de Jacques Chirac sur la base de l’interview qu’il a accordée à Michel Drucker dans le cadre de l’émission dominicale consacrée à Bernadette Chirac. On aurait aimé que ces prises de position des uns et des autres interviennent plus tôt, et en tous cas lorsque la majorité présidentielle nécessitait l’unité et la loyauté qui ont tant manqué. Désormais, la consigne semble être claire : après avoir prôner la rupture, il faut désormais rallier l’électorat chiraquien à la cause du candidat Sarkozy. Même si l’on ne peut que se satisfaire de cette nouvelle tendance, la brutalité des attaques proférées au cours des deux dernières années à l’encontre de l’action du Président de la République et du Premier Ministre risquent de laisser des traces.
Extrait de l’article Quand les députés sarkozystes rendent hommage au chef de l'État, publié dans le Figaro du 9 février 2007 sous la plume de Sophie HUET.
Pour les députés sarkozystes, les propos de Jacques Chirac sont sans ambiguïté : le chef de l'État est évidemment sur le départ. "Je les interprète comme la volonté du président de la République d'occuper des responsabilités au plan international, pour le maintien de la paix, la recherche d'un équilibre au Moyen-Orient, ou sur les questions de climat et d'environnement", analyse Pierre Méhaignerie. Le secrétaire général de l'UMP le voit jouer un rôle "comme Bill Clinton", l'ancien Président des États-Unis. Pour Dominique Paillé, "Jacques Chirac prépare les Français à une annonce de non-candidature, mais cela ne veut pas dire, précise le député des Deux-Sèvres, qu'il se retire définitivement de la vie politique, ce que je ne souhaite pas". Conseiller politique du candidat de l'UMP, Patrick Devedjian pense que Jacques Chirac "s'apprête à soutenir Nicolas Sarkozy" mais qu'il "choisira le moment pour le dire". Bernard Accoyer, le patron des députés UMP, observe : "Toute sa vie Jacques Chirac a été au service de la France, cette priorité reste la sienne".Laurent Wauquiez, l'un des porte-parole de la nouvelle génération, considère qu'il s'agit d'une "reconnaissance à demi-mots, qu'il a l'intention de passer le relais". "Il faudra, dit-il, respecter ce moment d'émotion difficile pour un homme qui laissera une trace historique beaucoup plus importante qu'on ne le croit dans l'histoire de la Vème République ". Axel Poniatowski juge que le chef de l'État a "une assez belle manière" de préparer les Français à son départ de l'Élysée. Au passage, il souligne que le chef de l'État "s'est efforcé, avec persévérance, de maintenir la paix dans le monde". Thierry Mariani rend également hommage à Jacques Chirac qui "a une très bonne image à l'étranger" et qui a "fait des réformes de fond". "Les Français l'aiment bien mais ils veulent qu'il passe la main", pense le député du Vaucluse. Étienne Pinte rappelle, lui, que le chef de l'État a été "un visionnaire" en matière de développement durable et d'écologie. Le député maire de Versailles verrait bien Jacques Chirac présider "une sorte d'Organisation des Nations unies bis pour défendre l'environnement". Nadine Morano n'est pas avare de compliments sur "l'énergie", "le tempérament" de Jacques Chirac, qui "a très bien défendu les intérêts des Français". "En matière commerciale, il restera l'un des meilleurs VRP des produits français, du TGV, d'Airbus", poursuit le député de Meurthe-et-Moselle, qui "ne voit pas Jacques Chirac arrêter son activité politique". Yves Jego partage ce point de vue : "Après quarante ans de vie politique, on n'imagine pas qu'il puisse ne rien faire", considère l'élu de Seine-et-Marne, qui met à l'actif de Jacques Chirac le fait d'avoir "permis à la France d'opérer un virage en douceur vers un monde qui change".