Le soutien d'Alain Juppé à la loupe
Sur son blog-notes, Alain Juppé a publié, le 9 janvier, une contribution dont le titre, "Pourquoi je soutiens Nicolas Sarkozy", nous laisse sur notre faim. Bien entendu, la position de l’ancien Premier Ministre de Jacques Chirac est tout à fait respectable mais, malgré toute l’admiration que nous vouons à Alain Juppé, certains passages de son message nous semblent loin d’être convaincants lorsqu’on les compare avec les propos ou les actes du Président de l’UMP. Aussi, c’est avec beaucoup de déférence que nous relevons quelques incohérences dans ce message de soutien auquel nous nous permettons, en toute amitié, d’ajouter nos propres observations.
(…) J’ai envie d’exprimer moi-même, et d’entendre de la part des candidats, un certain nombre d’idées auxquelles je crois. Et d’abord l’amour de la France. De ce qu’elle est, de ce qu’elle doit demeurer. Je crois à la vertu de fidélité, y compris chez les peuples (côté fidélité, il est vrai que Nicolas Sarkozy a fait ses preuves. Alain Juppé a t-il oublié la campagne présidentielle de 1995 ? Sans parler des incessantes critiques distillées par Nicolas Sarkozy depuis 2002 et visant à la fois le Président de la République et le Gouvernement… auquel il appartient pourtant ?)
Je crois en une France fidèle à elle-même. Fidèle à son histoire, à sa culture, à sa langue, à ses valeurs (…) (la discrimination positive fait elle-partie des valeurs qu’évoque Alain Juppé ?…).
Fidélité de la France encore à sa vocation européenne et internationale : faire entendre une voix libre, qui parle de paix, de coopération, de développement, de justice, de gouvernance mondiale plutôt que de confrontation ou de coercition. (…) (bel hommage à la politique étrangère de la France telle que l’a conduite le Président Chirac depuis son élection et dont le point d’orgue fut certainement l’intervention du Ministre des Affaires Etrangères - … un certain Dominique de Villepin - à l’ONU, le 14 février 2003, défendant, avec courage et conviction, la position française contre l’intervention militaire américaine en Irak).
Voilà quelques-uns des sujets dont j’aimerai voir débattre les candidats à la prochaine élection présidentielle.
Dans ma famille politique, Nicolas Sarkozy s’est déjà exprimé sur certains d’entres eux. J’ai partagé plusieurs de ses analyses ou de ses projets (…) Il lui appartient maintenant de préciser son projet présidentiel, par exemple : sur le fonctionnement de nos institutions (on sait déjà que le futur candidat soutenu par l’UMP souhaite dénaturer la philosophie du régime institutionnel voulu par le Général de Gaulle), sur le nécessaire effort de défense de la France (on se souvient de la confrontation entre Michèle Alliot-Marie, Ministre de la Défense, et Nicolas Sarkozy lorsqu’il était Ministre de l’Economie et des Finances, sur les arbitrages budgétaires en faveur des armées… et qui avait valu une mise au point cinglante de la part du Président de la République lors d’une de ses traditionnelles interventions du 14 juillet : "je décide, il exécute") ou sur la spécificité de sa politique étrangère (que Nicolas Sarkozy s’est permis de qualifier "d’attitude arrogante" lors d’un voyage aux Etats-Unis).
Le choix d’un candidat, c’est le choix d’un projet. C’est aussi le choix d’une personne. Je connais bien Nicolas Sarkozy, depuis longtemps. Je connais ses forces et ses faiblesses, comme il connaît les miennes. J’apprécie sa capacité d’agir. Il en a fait la démonstration depuis 2002. C’est un atout majeur pour conduire une grande Nation dans un monde turbulent. Il y faut aussi la capacité de rassembler (recueillir le plébiscite de 300.000 militants n’est certainement pas une preuve de la capacité à rassembler les français dans leur diversité et jeter à la vindicte populaire certaines catégories – les juges, les "patrons voyous", les jeunes, les fonctionnaires – ne correspond pas à l’esprit de responsabilité qui doit prévaloir lorsqu’on veut accéder aux fonctions suprêmes), qui implique le refus de toute forme d’intégrisme (à entendre les commentaires des porte-flingues du Ministre de l’Intérieur, on se demande si ça ne ressemble pas, parfois, à de l’intégrisme), le sens de l’écoute et le respect du point de vue d’autrui (Michèle Alliot-Marie a pu apprécier cette capacité à accepter les divergences de vues lorsqu’elle s’est faite huer par les cadres de l’UMP lors d’un bureau politique ou par les militants sarkozystes au cours d’un forum régional). Nicolas Sarkozy veut et peut rassembler (comme quoi, vouloir n’est pas toujours pouvoir...).
Le temps du débat interne à notre famille politique est maintenant clos (mais ce débat avait-il déjà été ouvert ?). Comme je l’ai affirmé à plusieurs reprises, ces dernières semaines, seul Jacques Chirac, du fait de sa fonction, ne saurait être tenu par des procédures de parti. S’il choisissait d’être candidat, une situation nouvelle serait alors créée, qu’il appartiendrait à chacun d’analyser (Ouf ! Tout n’est donc pas plié. Il existerait donc une vie politique hors de l’UMP. C’est rassurant).
Pour l’heure, l’UMP va se prononcer. Pour ma part, et pour les raisons que je viens de dire, j’ai décidé d’apporter mon soutien à Nicolas Sarkozy.
Alain Juppé – Blog Notes du 9 janvier 2007